Mes blagues sur les chattes, les bières et les cortèges ne prenaient plus depuis que des morts avaient décidé de me voler la vedette. Enfin, techniquement, je n’avais pas la vedette. Les premières semaines, j’allais à des réunions avec toutes sortes d’amis mal habillés qui venaient se saouler à mort et baiser des morues. Je m'installais dans un coin, souvent avec des bières, des fois avec une bouteille de Jack et j'attendais que des marxistes lancent leur petit vocabulaire. Alors je gueulais, des fois sur le fond, des fois sur leurs dreadlocks. Je parlais des valeurs du rugby et conseillais aux filles de se laver avant de prendre la parole en public. Trois-quatre types qui étaient mes amis riaient, puis on s'en allait trainer dans les couloirs désertés des facultés en chantant des mots qui nous passaient par la tête. On faisait aussi des actions dans les rues au non des syndicats qu'on n'aimait pas. L'unef vous crache à la gueule ou Sud-Étudiant brule vos poubelles. Des gens voulaient nous frapper, on touchait les culs des filles, prime à la moins bien roulée, on était raide bourrés à 15h, j'en ai perdu ma voiture. Puis, parce qu'on avait lu des bouquins, on a rejoint le seul cercle des vrais types intéressant du coin. Je m'y taisais la plupart du temps. Je préparais mes phrases et je parlais de la révolution sans demain qu'on menait, de l'impossible gestion politique et du fait qu'il fallait s'en donner à coeur joie avant que des bonshommes décident que seule une autorité injuste pouvait avoir raison, ou au moins conserver sa raison. Les filles étaient toutes des étrangères, elles avaient des bombes dans la chatte et parfois dans leurs placards. Deux-trois types, revenus du chiappas ou de douteux squat à Varsovie ("là bas, il reste un vrai esprit squat tu vois") avaient le premier rôle. Ils refusaient de se laisser pousser les cheveux et les habits sales. Ensemble on pestait contre tout le monde et entre nous, il était entendu que nous seuls savions ce qu'il fallait faire. 33% des filles venaient pour le cul. Il y avait 3 filles. Au bout d'une semaine on s'est lassé de lutter ensemble pour lui passer dessus, on a fait ça une bonne fois pour toute et le groupe s'est explosé en deux parties. Une qui allait être amenée à faire du fameux, une autre, fumeuse, qui ira baiser ailleurs.