mercredi 11 mars 2009

Vie et mort.

Matthieu passe me prendre à vingt heures avec la vieille bagnole de sa mère. Il a mis son blouson en cuir gris informe et une vieille chemise à carreau qui sent la campagne. On va se bourrer la gueule dans un champ, sans aucune raison valable, même pas l'ennui. Il est prévu qu'il y ait des meufs mais avec Matthieu on s'en branle, au village, on a des meufs mille fois mieux que toutes celles qui pourraient sortir des bois ce soir. Ça veut pas dire qu'on va pas draguer et ça veut pas dire qu'il n'y aura pas une érection ou deux. Seulement la clé c'est qu'on n'a pas les crocs, donc est détendu du gland, à l'aise dans nos baskets. J'ai des Alife Everybody en toile de parachute, Matthieu a un truc informe: il s'en branle de son style. Ou plutôt, plus il est pourri, plus il est content. On mange des sandwichs, ah merde non, on s'arrête au Intermarché pour acheter de la bière, de la vodka, du vin et des trucs à manger. On prend pain, fromage et chips, un peu de saucisson et puis une poche de Regal'ad. C'est moi qui veut les bonbons, j'ai une sorte de dépendance aux bonbons, je peux pas passer une soirée sans, c'est vraiment dingue. En plus, c'est nouveau, gosse j'étais plus dans le salé, genre rillettes/fromage. Ça j'ai pas lâché. On mange nos sandwichs dans la bagnole tout en envoyant des textos à des gens qu'on connait pour leur dire de venir nous rejoindre. L'idée est vraiment de glander là bas, la plupart des copains sont oks, c'est l'été, il fait doux et on est peinards. La radio passe du Jean-Jacques Goldman, Envole Moi, une de mes chansons de lui préférée. Merde, les arpèges au synthé c'est du Jésus. Matthieu aime pas, c'est un hippie.

Mon arcade ne saigne plus mais dès que j'y repense et que je me marre ça repart. Matthieu est couché sur la banquette arrière, il a un fou rire aussi. Au bout d'un moment, il finit par se relever et escalade pour s'assoir côté passager. Il gueule comme un demeuré avec une bouteille à la main -il a sauvé le dernier rouge. Son pantalon est plus déchiré que je le pensais, son caleçon dépasse. En chantant une sorte d'improvisation dont le refrain est à peu près "La grosse salope, la grosse pute", il se met debout, tête au travers du toit ouvrant et mime de la baise. On gueule encore un peu. Avant ce soir j'avais vu des filles horrifiées, des gars aussi, mais surtout des filles, mais un tollé général comme ça, c'est une première. Poser sa bite sur la bouche d'une fille moche membre d'un comité Palestine en plein milieu d'une conversation sur Gaza, c'est chapeau l'artiste, c'est le wall of fame direct. Elle le méritait. Tout propos de demeuré devrait être sanctionné par une bite entre les lèvres. Alors évidemment ça a fait des histoires mais c'était nécessaire, sinon on se fait marcher sur les pieds et c'est la merde. Je pense que si y'avait eu que ça on aurait quand même pu rester là bas, mais ce fut pas le cas. Essayer de baiser les petits frères d'Anaïs la bonnasse aussi c'était délicat, mais ça leur fera une leçon: l'alcool dans les champs c'est de la merde, achetez vous plutôt des dictionnaires à l'avenir. Pareil pour ceux qui voulaient fumer de la beuh. Merde, on est en 2009, la beuh c'est tellement vingtième siècle que la renvoyer au vent c'est encore la meilleure chose à faire. C'était drôle comme passe-temps, et même si je saigne un peu je m'en branle. Après une bonne petite douche on va aller dans la boîte à mineures locales, encore une fois pas pour choper mais pour tâter le pouls. On joue ça local, on joue ça vrai. Cette vie est drôle.